Dans cet article on vous rappelle les définitions de ce que sont les empreintes carbone et écologique.

Puis nous vous présenterons différents calculateurs d'« empreinte carbone » et d'« empreinte écologique » ainsi que les  résultats  d'un membre de notre équipe.

Enfin nous vous proposerons des  solutions concrètes  et qui font la différence pour réduire votre impact sur l'environnement.

Quelques définitions importantes

Empreinte carbone

L’empreinte carbone c’est la quantité de GES émise par les activités humaines, exprimée en équivalent carbone (ou « eqCO2 », « CO2e », « CO2-eq »). Elle peut être calculée pour un individu, une entreprise, à l’échelle d’un pays, pour un objet ou un service.

Empreinte écologique

L’empreinte écologique (ou empreinte environnementale) est un indicateur de l’effet des activités humaines sur la nature. Contrairement à l’empreinte carbone, elle n’est pas focalisée sur les GES et considère l’impact environnemental plus global en comparant d’une part “la demande” (les activités humaines) et d’autre part “l’offre” (la capacité de la Terre à produire des ressources, à absorber des déchets et à se régénérer : la biocapacité). Elle est exprimée en hectares.

L’empreinte écologique tient compte de :

Qu’est-ce que le bilan carbone ?

Le bilan carbone est une méthodologie de calcul développée par l’ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie) en 2004 pour mesurer l’empreinte carbone d’une entité, par exemple, d’un individu (on parle alors de “bilan carbone personnel”) ou d’une entreprise.

On teste des calculateurs d’empreinte carbone et/ou écologique

Comment calculer son empreinte carbone ?

En utilisant un calculateur d’empreinte carbone ou de bilan carbone. Il en existe une ribambelle en ligne :

Ces outils sont gratuits, plus ou moins complets et assez longs à remplir. L’objectif est de passer en revue tous les postes de dépenses énergétiques sur une année puis de vous donner une approximation des émissions de gaz à effets de serre en lien avec votre mode de vie.

Par exemple un membre de l’équipe Projet Pangolin (moi…) a utilisé le calculateur de l’ADEME (nos gestes climat).

Résultat : Je produirais en moyenne 5 tonnes eqCO2 par an. C’est mieux que la moyenne des français qui se situe à 11 tonnes mais c’est LOIN de l’objectif des 2 tonnes qui doit être atteint si on veut rester sous la barre des 2°C (objectif maximal de réchauffement définit dans les accords de Paris, signés lors de la COP21).

D’après ma simulation, les postes énergétiques les plus couteux sont : l’alimentation, les transports et les services publics

Pourtant, je n’achète pas de viande et je mange très peu de produits d’origine animale. Je fais tous mes trajets maison-travail à pied et j’achète mes vêtements très majoritairement de seconde main. Mais j’ai encore des progrès à faire, je le reconnais. Néanmoins, il y a un poste sur lequel je n’ai aucune emprise : les services publics. On en discute plus loin.

Comment calculer son empreinte écologique ?

Avec un autre calculateur dédié, évidemment ! La liste d’options est nettement moins longue :

📣 Bon à savoir

On trouve beaucoup de calculateurs d'empreinte écologique canadiens et suisses (et donc qui utilisent des valeurs moyennes de consommation propres à leurs pays). Vous pouvez les tester mais ils seront moins précis compte tenu que vous n'habitez pas là-bas.

Comme vu plus haut, l’empreinte écologique tient compte de l’impact des émissions de GES mais aussi de la capacité de la Terre à produire et se régénérer. C’est une autre forme d’approximation et c’est donc intéressant de faire les deux pour avoir une vision plus globale des conséquences de notre mode de vie sur la planète.

Par exemple, j’ai utilisé le calculateur de la fondation WWF qui utilise des moyennes suisses.

Résultat : avec ce calculateur je produirais en moyenne 8.25 tonnes équivalent CO2 par an. Il me précise que « Si l’ensemble de la population mondiale vivait avec ce même mode de vie, nous aurions besoin de 1.89 planètes. Malheureusement, nous n’avons que celle-ci. » 

Ici mon mode de vie fait sauter les compteurs. Mais pourquoi ?

Tout d’abord le calculateur de la WWF m’a posé des questions sur mes 5 dernières années et ça ne fait pas 5 ans que je fais autant d’efforts pour le climat. De plus, ce calculateur ne se base pas sur les mêmes mesures que les calculateurs d’empreintes carbone puisqu’il intègre en plus l’impact sur les écosystèmes. Il est donc normal d’observer des résultats différents.

Ceci dit, les deux résultats vont dans la même direction : je pollue trop.

📣 Petite précision

On ne vous propose pas un comparatif de ces différents calculateurs pour plusieurs raisons. 1- ca serait un cauchemar de réaliser une telle étude (nous ne sommes que des bénévoles pour cette association). 2- le but de ces calculateurs n'est pas d'avoir une estimation parfaite de notre empreinte carbone mais plutôt d'obtenir un ordre de grandeur. L'idée c'est de nous faire prendre conscience de l'impact de notre consommation et de décider d'agir en conséquence.

Compenser ses émissions, une fausse bonne idée ?

À la fin de certains calculateurs, après vous avoir annoncé votre énorme estimation d’émissions d’équivalent CO2 par an, on vous propose ce qui ressemble à une solution miracle : compenser vos émissions carbones. Mais qu’est-ce que cela signifie ?

Si vous nous lisez depuis longtemps, votre esprit critique et votre flair à trucs louches devraient s’agiter. Et vous auriez bien raison.

Lorsque ces fondations vous proposent de « compenser » vos émissions en leur faisant un don proportionnel à votre impact écologique, cela ne vient pas l’annuler comme par enchantement. Si ce geste est une bonne chose puisqu’il participe à financer des projets qui soutiennent la préservation de la biodiversité (en replantant des arbres par exemple), il n’efface en EN AUCUN CAS les conséquences de votre impact de vie sur l’environnement.

GREENWASHING ALERT 🚨

Eh oui, compenser en plantant des arbres et continuer à consommer comme nous le faisons (ce pourquoi on a besoin de déforester notamment) est contradictoire… on se doute donc bien que l’on ne pourra pas faire les deux en même temps !

Ces propositions de compensation sont souvent du registre de l’hypothétique. Elles sont basées sur l’idée que ces forêts replantées vont effectivement absorber autant de CO2 que ce qui est émis.

De plus, si l’on déforeste en arrachant des forêts centenaires, on ne replante que des jeunes arbres. Or , une forêt de cent ans n’a pas la même capacité “puit de carbone” qu’une forêt composée d’arbres de 2 ans (et qui seront surement tous de la même essence… un autre point bien négatif).

S’ajoute à cela qu’on suppose que ces forêts puissent vivre assez longtemps (et ne pas bruler, ne pas être impactées par le réchauffement climatique qui abime les forêts que nous avons déjà), qu’il y aura assez de place sur Terre pour planter tous ces arbres (et que l’on n’aura pas besoin de détruire d’autres écosystèmes pour planter ces fameux arbres).

Souvent, ces propositions sont en fait du treewashing, qui fait écho au greenwashing dont on vous parlait ici.

Un autre point important sur la compensation carbone concerne les océans. Ces derniers sont des puits de carbone très importants, comme les forêts. Pourtant, le réchauffement climatique acidifie l’eau et réduit la capacité des océans à stocker du carbone. On pourra planter tous les arbres que l’on voudra, on ne corrigera l’acidité des océans qu’en réduisant nos émissions.

En bref, compenser ses émissions pour atteindre la neutralité carbone n’est pas possible. Planter des arbres et restaurer les écosystèmes (et puits de carbone) est absolument ESSENTIEL, mais la neutralité carbone ne pourra être atteinte que si l’on réduit en parallèle nos émissions.

L'importance des mots

Un des problèmes principaux ici est le choix du terme « compenser » car il porte à confusion. On peut facilement croire que ce n’est pas grave de prendre l’avion puisque l’on reverse 3,42€ pour « compenser » notre vol. L’utilisation de ce mot peut avoir l’effet pervers de nous déresponsabiliser dans nos choix, de nous faire croire que si l’on se paie des « crédits carbone » alors on n’a pas d’impact environnemental.

Les entreprises s’en servent pour nous faire croire que ce qu’elles nous vendent est « neutre en carbone ». Mais gardez bien en tête que ces options ne viennent pas effacer nos actes, les GES émis sont toujours émis. Si c’était si simple, ça ferait longtemps qu’on aurait résolu le problème du réchauffement climatique, vous vous en doutez bien.

Comment réduire son empreinte carbone ?

Souvent les résultats de ces calculateurs sont édifiants et on peut se sentir un peu désemparés. On ne se décourage pas pour autant ! On vous présente ici, les gestes les plus efficaces pour réduire son empreinte environnementale.

Les gestes du quotidien pour réduire son empreinte carbone

Pour la rédaction de cette partie nous nous sommes essentiellement basées sur un rapport de Carbone 4. N’hésitez pas à le consulter pour rentrer dans les détails.

impact des gestes individuels sur empreinte carbone

L’illustration juste au-dessus synthétise ce qu’on a appris de ce rapport. L’étude a classé 10 gestes individuels classiques en fonction de leurs impacts sur notre empreinte carbone :

📣 Petit rappel

Personne n'est parfait. Si l'on ne parvient pas à être 100% végétarien, on peut réduire sensiblement sa consommation de viande et autre produits animaux. Si l'on ne peut pas toujours covoiturer, on peut essayer de le faire le plus souvent possible. Cela permet de réduire son impact de façon importante, et de découvrir de nouvelles habitudes pour aller vers le mieux.

Le rôle des propriétaires

Ensuite, si vous êtes propriétaires de logements, vous pouvez faire plus : en investissant dans la rénovation de vos propriétés. Rénover le bâti existant représente un des challenges majeurs à relever et permet de réduire fortement notre empreinte carbone. Si vous en avez les moyens, alors :

Des crédits d’impôts sont proposés pour inciter les particuliers à rénover leurs logements (plus d’infos ici).

Enfin, dans le rapport de Carbone 4, un dernier geste est proposé : le passage à la voiture électrique. Notre avis sur la question n’est pas tranché. Comme vous le savez, en prenant en compte toute la chaine de production et en ajoutant le fait que l’électricité n’est pas 100% décarbonée, ça complique le débat (si vous voulez en savoir plus, RDV ici). En ce qui concerne les transports donc, ce qu’on vous conseillera toujours c’est de privilégier le train au maximum.

Les gestes collectifs pour faire la différence

Le constat de ce rapport est que si on investissait tous pour rénover thermiquement nos logements au maximum, que l’on utilisait des voitures électriques et que l’on cumulait à la perfection tous les autres gestes que l’on vous a cité juste au-dessus, on aurait réduit nos émissions réelles de moitié. QUE DE MOITIÉ.

En effet, pour arriver à réaliser les objectifs de l’Accord de Paris (c’est à dire atteindre 2 tonnes d’émission équivalent CO2/an/personne), il faudrait (en plus de tout ce qu’on vient de citer) décarboner l’agriculture, l’industrie, les services publics, le fret de marchandises et les énergies. Autant de choses sur lesquelles on a, individuellement, qu’un pouvoir limité. Comment s’y prendre alors ? Penser collectif !

Tout ça donne un peu le vertige. Mais on ne se laisse pas abattre et qu’est-ce qu’on retient ?

1) Ce n’est pas entièrement de notre faute

Nous sommes victimes du système dans lequel nous évoluons. On ne peut pas faire changer le réseau de chauffage de l’immeuble que l’on habite juste parce qu’on l’a décidé, on ne peut pas arrêter de consommer certains outils technologiques car nos métiers en dépendent etc. Néanmoins, on peut choisir de prendre conscience de ses privilèges et essayer de réduire son impact autant que possible.

2) Nos gestes individuels comptent

Les pratiques éco-responsables individuelles ont un impact non-négligeable (n’en déplaise à ceux qui affirment le contraire). L’adoption de ces gestes quotidiens permet de réduire significativement son empreinte carbone (de 10% en adoptant un régime végétarien, on vous le rappelle). Ils sont nécessaires mais malheureusement, ils ne sont pas suffisants.

3) Il faut faire plus, il faut agir collectivement

La pollution liée aux activités humaines est systémique. Sans changement profond, au niveau des entreprises et à l’échelle étatique nous ne pourrons pas limiter nos émissions de GES et rester en dessous du seuil des 2°C.

📣 Lutte climatique et lutte contre les inégalités sont intimement liées.

Pourquoi ? Parce que 10% des citoyens de l'Union Européen (les plus riches, 43,6 millions d'individus) émettent autant de GES que 50% des citoyens les plus pauvres (216 millions d'individus). Il faut donc réduire les émissions des pays les plus riches pour tenir les objectifs des accords de Paris. Et, à moins que vous soyez PDG de multinationale, ce changement ne s'effectuera que grâce à une révolution du système.

En conclusion

Nous appartenons à l’espèce Homo sapiens. En tant que tel, nous sommes des individus sociaux capables de communiquer mais aussi de s’organiser autour d’un récit commun.

Aujourd’hui, au sein des démocraties (ahem des fois on se pose des questions mais bon.. au passage #darmaninDémission #ACAB) que nous habitons, nous avons un rôle à jouer. Pour pousser nos gouvernements à agir il ne suffit pas de râler dans nos salons. Il faut passer à l’action, concrètement. Il y a une infinité de formes de passage à l’action : en parler avec ses ami.e.s/familles, s’inscrire sur les listes électorales de sa municipalité et voter, créer des initiatives locales pour développer des solutions entre citoyens, organiser/participer à des manifestations etc.

Nous devons prendre nos responsabilités individuellement en agissant dans notre quotidien mais aussi de manière collective, main dans la main. Sans cette étroite collaboration, nous ne pourrons pas respecter les objectifs de l’Accord de Paris et notre avenir restera plus qu’incertain.

Temps de travail cumulé : 35h
Autrices : Élodie Portanier et Salomé Bourg

Autres sources et références

[1] IPCC Fifth Assessment Report, 2014

[2] https://www.liberation.fr/apps/2018/09/empreinte-carbone/

[3] https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/poids_carbone-biens-equipement-201809-rapport.pdf

Difficile aujourd’hui de prétendre que nos activités virtuelles soient sans conséquence sur l’environnement. Encore plus difficile de comprendre comment ces actions qui semblent « immatérielles » polluent. Ce sont ces deux raisons qui nous ont motivé à écrire cet article où nous vous proposons de décortiquer ensemble ce qu’est la pollution numérique.

Dans cet article vous trouverez : 

Empreinte écologique ou environnementale et empreinte carbone, comment les définir ?

Empreinte carbone

L’empreinte carbone est définie comme la quantité de GES (Gaz à Effet de Serre) émise par les activités humaines. Elle est exprimée en équivalent carbone (ou “eqCO2”, “CO2e”, “CO2-eq”). Elle peut être estimée pour un individu, une entreprise, à l’échelle d’un pays ou pour un objet et sa valeur finale va dépendre de ce que l’on considère dans le calcul. Il est très compliqué de calculer une empreinte carbone car cela dépend de ce que l’on inclut dans ce calcul et c’est pourquoi les chiffres peuvent varier parfois dramatiquement selon la méthode de calcul employée [1].  Si vous souhaitez en apprendre plus sur le calcul de l’empreinte carbone consultez notre article dédié

Empreinte écologique

Le terme fait écho à un autre, l’empreinte écologique (ou environnementale). Mais contrairement à l’empreinte carbone, celle-ci ne prend pas en compte que les émissions de CO2 dans l’atmosphère. Elle considère l’impact environnemental sur un territoire (d’un hectare), c’est à dire à quelle vitesse nous consommons les ressources et produisons des déchets. En la comparant à la biocapacité, qui est la capacité à produire des ressources et se régénérer de ce même territoire, nous pouvons estimer la pression des activités humaines sur celui-ci. Lorsque l’empreinte écologique est supérieure à la biocapacité, le territoire a alors un déficit en biocapacité. Si c’est l’inverse, le territoire a une réserve de biocapacité.

Le Global Footprint Network est un institut de recherche qui calcule chaque année cette pression humaine sur l’environnement en hectare globaux (i.e. à l’échelle de la planète, note). Il faudrait actuellement 1,75 terres pour subvenir aux besoins de l’humanité. Cette mesure est ensuite souvent reprise et transformée en dette annuelle de la planète par de nombreuses ONG, c’est le fameux jour du dépassement. 

Qu’est-ce que la pollution numérique (ou pollution digitale) ?

La pollution numérique fait principalement référence à l’empreinte carbone générée par le secteur du numérique, cela va de la communication, l’information aux technologies. On peut distinguer le secteur du numérique en 3 grandes catégories : les réseaux de télécommunications, les data centers, les terminaux [4,5,6].

La pollution numérique en quelques chiffres 

On peut compartimenter la pollution numérique en deux catégories : la production et l’utilisation. En effet, avant d’arriver dans nos mains nos objets connectés sont produits, ce qui génère des émissions de GES (entre 45% et 50% de la conso énergétique totale [7]). Ensuite nous les utilisons, et via nos habitudes numériques des GES sont émis (entre 50% et 55% de la conso totale [7]).

La pollution digitale au moment de la production

Si on reprend le cycle de vie d’un objet, on voit que dans le cas des objets connectés, la production nécessite l’extraction de minerais, l’acheminement de ces matières dans les usines de production puis le déplacement du produit fini pour qu’il soit vendu. Toutes ces étapes sont consommatrices d’énergies et provoquent des émissions de GES. Elles ont aussi des conséquences écologiques et sociales. En effet, l’extraction des minerais se fait dans des conditions terribles pour les écosystèmes présents autour et pour les humains qui effectuent ce travail [9].

En tant que consommateur nous avons assez peu de pouvoir à ce niveau-là. Nous n’avons pas la capacité de changer les lignes de production. Nos seuls recours possibles sont de :

  1. limiter le nombre d’objets numériques que nous possédons, 
  2. de les faire réparer autant que possible pour allonger leur durée de vie
  3. et de privilégier la seconde main à l’achat d’un produit neuf.  

La pollution digitale liée à notre utilisation

Contre intuitivement, nous ne sommes pas 100% maîtres de ‘nos’ pratiques digitales. En effet, notre utilisation des outils numériques dépend de :

Que sont les data center et pourquoi polluent-ils ?

Les data centers désignent les lieux physiques (bâtiments) dans lesquels sont regroupés des milliers de serveurs informatiques. Ces serveurs, ou hébergeurs, qui consistent en une série d’ordinateurs mis en réseau, servent au stockage et au traitement des données numériques. 

Envoi d’un message sur Whatsapp, réception d’un mail avec ou sans pièce jointe, photos postées sur Facebook/Instagram, utilisation d’un cloud pour stocker vos documents, consultation d’un site web … Toutes ces pratiques digitales quotidiennes reposent sur le stockage et le traitement de données numériques au sein des data centers. 

Leur bon fonctionnement requiert une quantité considérable d’électricité : pour les alimenter mais aussi pour les refroidir. En 2015, les spécialistes du sujet prévoyaient une explosion du trafic internet (et par conséquent de la pollution numérique générée par les data center) [11,12] et sommaient de trouver des solutions pour réduire notre impact.

Spoiler alert : les humains ne sont pas arrivés à se calmer sur leur utilisation numérique mais les gros pollueurs que sont les data center ont fait d’énormes progrès. Des hypercentres regroupant de nombreux data center ont été créé, divisant par 10 les estimations de demandes en électricité horizon 2030 [13].

⚠️Attention : en aucun cas nous ne voudrions faire passer le message que l’on peut attendre une solution magico-technologique pour nous sortir de ce pétrin. Ces résultats démontrent simplement que la gestion des data center n’était pas optimisée. Les prédictions prévoient toujours une augmentation des GES avec les années, simplement elle sera probablement moins impressionnante [13]. 

Encore un exemple de pollution où nous n’avons aucun moyen d’action.

Le streaming vidéo a-t-il un impact sur l’environnement ? (Netflix, YouTube etc)

La réponse va vous déplaire… mais évidemment : OUI. Le streaming vidéo est un des facteurs de pollution numérique. Le rapport du Shift Project (2019) [7] est dédié à cette question (si vous avez envie de creuser un peu plus ce sujet). 

Le streaming vidéo s’inscrit dans la catégorie RÉSEAUX de nos utilisations numériques. Le graphe suivant présente la répartition des flux de données en ligne mondiale de 2018. Ce qu’on qualifie en général de vidéos en ligne correspond à 60% (les catégories en bleu) des flux de données globaux. La presse pointe souvent du doigt l’impact grandissant des plateformes de streaming telles que Netflix [14, 15, 16] mais nous avons été surprises de constater que l’addition de l’impact de la pornographie et des tubes (Youtube, Dailymotion) supplante l’impact des plateformes de vidéos à la demande.

Plateformes de streaming

Avant l’avènement des plateformes de streaming, nos consommations d’audiovisuel se limitaient à la télévision et aux vidéo clubs. En 2014, des chercheurs américains ont voulu comparer les émissions de GES générées par le visionnage d’un même film en ligne ou avec location dans un vidéo club (production du DVD, trajet pour récupérer le DVD etc). Leur étude est très claire et démontre que le visionnage en ligne est moins émetteur de GES que la location de DVD TOUTES CHOSES ÉTANT ÉGALES PAR AILLEURS [17]. On souhaite insister très fort sur ces derniers mots car cette étude est souvent utilisée pour dire que «c’est pas si grave» de regarder des vidéos en ligne. Il serait envisageable de tenir ce genre de propos, si et seulement si, notre consommation d’audiovisuel n’avait pas considérablement augmenté depuis ces 10 dernières années [18].

Or l’accessibilité simplifiée à ces contenus ont bouleversé nos habitudes de consommation. Qui parmi nous peut affirmer qu’iel consomme autant de contenu audiovisuel maintenant qu’avant la popularisation de Netflix ? Personne. 

Et les e-mails ?

Le constat est similaire pour les e-mails. Comme toute pratique digitale, les échanges de mails sont source de pollution numérique (cf graphe précédent catégorie HORS VIDÉO). D’après l’Ademe [9], l’empreinte carbone d’un mail moyen avec pièce jointe est estimé à 0,3g - 50g eqCO2. Est-ce pour ça que l’on continue à faire des réunions de 2h qui auraient pu être résumée par un e-mail ? … le débat est ouvert.

Le numérique : un secteur à la croissance infinie

L’avènement du numérique est arrivé avec la promesse de connecter les gens entre eux, de communiquer plus rapidement qu’importe où ils se trouvent. Depuis une trentaine d’années le secteur des ICT connait une croissance importante [19]. Tout le monde (ou presque) possède au moins un terminal que ce soit un téléphone, un ordinateur ou bien une télévision par exemple. Entre 2015 et 2016, la bande passante liée à l’utilisation d’internet dans le monde a augmenté de 32% et si on s’attarde sur le continent africain elle a augmenté de 72%. Et cela n’est pas près de s’arrêter. 

Le défi d’une demande en électricité croissante

Seulement avec cette croissance du secteur, s’accompagne d’une augmentation de la consommation d’énergie. Certains modèles montrent que dans les pays de l’OCDE, une augmentation de 1% d’utilisateurs internet s’accompagne une augmentation de la consommation d’électricité de 0,108% [20]. En 2018 dans le monde, la demande globale en électricité est d’environ 20000 TWh (terawatt heure) on estime qu’elle aura doublé d’ici à 2030 [12], la part des ICT dans cette demande est évaluée à 51% [11]. Cette part tombe à 14% si l’on prend en compte les progrès en efficacité énergétique, notamment pour les data centers [21]. 

L’économie d’énergie au sein des ICT

De nombreuses recherches sont faites dans le domaine des ICT pour améliorer leur efficacité en matière de consommation d’énergie. C'est le cas notamment pour les datas centers qui sont responsables d’environ 19% de la consommation énergétique totale des ICT. Des prévisions de la demande en électricité prévoient une augmentation de la part des data centers qui pourrait passer à plus d’un tiers de la demande énergétique totale d’ici 2030 [12]. Ils sont donc une composante à ne pas négliger en terme d’amélioration de la consommation d’énergie. 

La majorité de ces data centers fonctionnent en réseaux en étant dispatchés à pleins d’endroits différents, on parle de fonctionnement en “cloud”. De nombreux efforts sont mis en place pour l’optimisation des algorithmes qui permettent aux data centers de fonctionner en cloud. Des algorithmes plus rapides permettent de consommer moins d’électricité [22]. Depuis quelques années, une autre solution a vu le jour, c’est celle des hypercentres. Rassembler des data centers au même endroit a permis de réduire leur consommation en énergie [12].

L’économie d’énergie grâce aux applications des ICT

La digitalisation via l’application des ICT permet de faire des économies d’énergies dans d’autres domaines. Dans les chaines de production on identifie 5 façons d’économiser de l’énergie grâce à la digitalisation : (i) la simulation de procédés de production, (ii) le design intelligent et les opérations de biens et services, (iii) la distribution intelligente et la logistique, (iv) le service client et enfin (v) l’organisation du travail [23]. 

D’autres études ont évalué le taux d’émissions carbone évitées grâce à la communication mobile, cela correspond à 30% dans le milieu du travail et de la santé, 30% dans les transports, 3% dans l’agriculture ou encore 11% dans la production industrielle [24].Est-ce que ces économies d’énergies faites grâces aux ICT se traduisent par une diminution de la consommation d’énergie ? Pas toujours...

Le retour à la réalité avec l’effet rebond

Une meilleure efficacité de la production entraine une réduction des coûts de production ce qui entraine donc une diminution du coût du produit ce qui induit alors une augmentation de la demande donc une augmentation de la production et donc augmentation de la consommation d’énergie [25]. C’est ce qu’on appelle l’effet rebond. Par exemple un effet rebond de 10% indique que les 10% d’énergies économisées grâce au progrès sont compensés par l’augmentation de la consommation de ce bien [26]. 

Cet effet rebond touche aussi bien les secteurs rendus efficace énergétiquement par la digitalisation que les ICT eux-mêmes (augmentation de la consommation de datas, arrivée de la 5G par exemple). Une étude a évalué l’effet rebond dans les ICT, et il est énorme, quasi 100% dans chaque catégorie [27]. L’étude s’est attardée à faire des scénarii à partir de données récoltées en 2011 : dans le scénario où les ICT deviennent plus accessibles en terme de prix, l’effet rebond en terme d’énergie utilisée et d’empreinte carbone est supérieur à 100% (141% et 153%). Le seul scénario qui permet de drastiquement réduire les effets rebond est celui où il y a une diminution de la consommation d’électricité (réduction de 10%) et une augmentation du prix des ICT, l’empreinte carbone tombe à 5% et l’énergie totale utilisée à 6%. 

Ce que l’étude montre c’est qu’il existe des solutions pour diminuer cet effet rebond mais que celui-ci n’est jamais à 0 : il est toujours présent... donc la sobriété est le maître mot.

Quelles actions concrètes pour atteindre la sobriété numérique ?

On ne le répètera jamais assez mais on ne peut pas espérer atteindre la sobriété (ici numérique mais en général énergétique) sans une action conjointe au niveau individuel et collectif.   

À échelle individuelle

On vous dresse ici une liste non exhaustive de petites habitudes qu’il est possible de modifier dans son quotidien :

  1. Réguler sa consommation de vidéos en ligne : regarder moins de contenu, regarder à faible résolution, privilégier le co-visionnage (comme le covoiturage mais avec Netflix), emprunter des DVDs à des amis, à la bibliothèque (en essayant de ne pas faire le trajet que pour cette raison).
  2. Limiter son stockage de données en ligne : nettoyer sa boite mail, supprimer ses vieilles photos Facebook, limiter l’utilisation des clouds en préférant stocker en local (sur un disque dur par exemple), faire le tri dans les discussions WhatsApp ou équivalent. 
  3. Apprendre à prioriser ses usages : dans un premier temps se questionner sur nos habitudes en général, puis essayer de faire le tri entre ce qui ne peut qu’être fait en ligne et ce qui peut être évité. Il n’y a pas de recette magique, cela dépend des métiers et des modes de vie de chacun.

À échelle collective

Comme rappelé par le rapport du Shift Project [7] : « Ni l’auto régulation des plateformes de diffusion ni le volontarisme des usagers ne peut suffire ».

En effet, demander gentiment aux entreprises, dont le business dépend uniquement du numérique (Meta, YouTube, Netflix, Google etc), de trouver des solutions n’est pas raisonnable. Le conflit d’intérêt est bien trop important. De manière similaire, nous l’avons vu tout au long de l’article, les individus ont un pouvoir d’action extrêmement restreint. Le poids du changement doit être partagé.

Une collaboration entre les politiques, les régulateurs, les entreprises et les consommateurs est plus que nécessaire.

Discussion

Lors de la rédaction de cet article nous nous sommes confrontées à quelques difficultés, notamment celle de trouver une définition claire du terme pollution numérique. C’est un mot parapluie dont on peut trouver autant de définition que d’articles sur le sujet, surtout lorsqu’on lit des articles de presse mainstream, des blogs ou des publications sur les réseaux sociaux. Nous avons vérifié les sources que nous avons utilisé et avons privilégié la littérature scientifique. 

De plus, il est utile de garder en tête que tous les chiffres avancés ici sont issus d'articles scientifiques et que ce sont des estimations associées à des méthodes de calculs spécifiques, ces chiffres peuvent varier et il n’est pas impossible de trouver d’autres chiffres venant de sources différentes. Cela étant dit, ça ne dénature pas le message de cet article, il faut simplement garder en tête les ordres de grandeurs plutôt que les chiffres exacts pour saisir les enjeux liés à la pollution numérique. 


Temps de travail cumulé : 45h
Autrices : Elise Say-Sallaz & Salomé Bourg
Illustration : Vincent Lhuillier

Références

[1]. Gombiner J. (2011) Carbon Footprinting the Internet. 

[4] Belkhir L, Elmeligi A. (2018). Assessing ICT global emissions footprint: Trends to 2040 & recommendations. J Clean Prod

[5] Aiouch Y, Chanoine A, Corbet L, Drapeau P, Ollion L, Vigneron V. Évaluation de l’impact Environnemental et Social Du Numérique En France et Analyse Prospective, État Des Lieux et Pistes d’actions. 2022.

[6] Freitag C, et al., (2021). The real climate and transformative impact of ICT:A critique of estimates, trends, and regulations. Patterns.

[7] Rapport The Shift Project 2019, Climat : l’insoutenable usage de la vidéo en ligne 

[9] ADEME – Avis technique : Terres rares, énergies renouvelables et stockage d’énergie, Octobre 2020 

[11] Andrae A, Edler T. (2015). On Global Electricity Usage of Communication Technology: Trends to 2030. Challenges.

[12] Jones N. (2018). How to stop data centres from gobbling up the world’s electricity. Nature

[13] Xu, M., & Buyya, R. (2020). Managing renewable energy and carbon footprint in multi-cloud computing environments. Journal of Parallel and Distributed Computing

[17] Shehabi, A., et al., (2014). The energy and greenhouse-gas implications of internet video streaming in the United States. Environmental Research Letters

[18] Marks, L. U. (2020). Let's Deal with the Carbon Footprint of Streaming Media. Afterimage: The Journal of Media Arts and Cultural Criticism

[19] Lange S, Pohl J, Santarius T (2020) Digitalization and energy consumption. Does ICT reduce energy demand? Ecol Econ

[20] Salahuddin M, Alam K. (2015). Information and Communication Technology, electricity consumption and economic growthin OECD countries: A panel data analysis. Int J Electr Power Energy Syst

Références suite

[21] Andrae ASG. (2019). Projecting the chiaroscuro of the electricity use of communication and computing from 2018 to 2030. (Preprint)

[22] Khosravi A, Garg SK, Buyya R. (2013). Energy and carbon-efficient placement of virtuals machines distributed cloud data centers. In European Conference on Parallel processing 

[23] Berkhout F, Hertin J. Impacts of Information and Communication Technologies on Environmental SustainabilitySpeculationsand Evidence. Brighton; 2001. 

[24] Williams L, et al., (2022). The energy use implications of 5G: Reviewing whole network operational energy, embodied energy, and indirect effects. Renew Sustain Energy Rev

[25] Plepys A. (2022). The grey side of ICT. Environ Impact Assess Rev

[26] Berkhout PHG, et al., (2000). Energy Policy 2000-Defining the rebound effect. Energy Policy.

[27] Joyce PJ, et al., (2019). A multi-impact analysis of changing ICT consumption patterns for Sweden and the EU: Indirect rebound effects and evidence of decoupling. J Clean Prod

C’est bientôt la rentrée, mais on a encore la tête en vacances. Pour prolonger l’été tout en progressant dans notre démarche écologique, nous vous proposons un article pour apprendre à voyager autrement.

Au sommaire de cet article :

PETIT DISCLAIMER : Attention, nous tenons à avertir nos lecteurices, cet article n’est pas une apologie de l’écotourisme. Il propose un point de vue moins idyllique de la question et propose de vous armer afin de reconnaître les situations de greenwashing qui y sont souvent associés. 

Une autre philosophie du voyage

Avant de plonger dans les méandres de l’écotourisme, nous nous devons de déconstruire notre vision du voyage. Depuis plusieurs décennies, nous baignons dans une culture de l’image où le voyage tient une place toute particulière. Il est synonyme d’aventure, de liberté, de jeunesse éternelle … de bonheur en quelque sorte. Dans ce conte de fées, l’objectif est d’enchainer sans fin, les paysages à couper le souffle, au rythme effréné des vols longs courriers avec pour seul compagnon notre grande insouciance. Dans nos imaginaires collectifs, ces couchers de soleil sur fond de Petit Biscuit (par pitié arrêtez ça), s’offrant aux plus téméraires ayant dénichés LA crique sauvage, sont sans conséquences, et quelque part nous les avons bien mérités. 

Or, TOUT LE MONDE aujourd’hui est conscient que ce mode de voyage est loin d’être écologiquement responsable. Tout comme pour le reste de nos habitudes issues d’un niveau de confort inégalé, nous allons devoir les modifier. Et ça s’annonce dur. En effet, cela revient à renoncer à découvrir des paysages et des cultures incroyables. Au-delà d’une habitude, ce sont des rêves dont il faut se défaire ainsi qu’une vision globale du futur que l’on avait fantasmé. Néanmoins, cela ne veut pas dire que nous devons remettre au placard toutes nos envies d’ailleurs, bien au contraire. 

Dans cet article nous allons voir que l’important est de changer notre point de vue sur notre conception du tourisme. Cela commence en acceptant de ralentir et de payer les acteurs locaux au prix juste. Ces futurs périples probablement plus lents, auront sans doute une autre saveur, un brin plus aventurier !

Qu’est-ce que ça veut dire concrètement voyager vert ? 

Définition de l’écotourisme

L’écotourisme (aussi appelé tourisme vert, ou encore tourisme d’aventure) est une forme de tourisme focalisée sur la découverte de la nature locale et se voulant plus respectueux de l’environnement et de ses habitants. Ce concept a émergé il y a une trentaine d’année avec de grandes ambitions et s’est construit en opposition au tourisme de masse. L’objectif initial était triple : éveiller une conscience écologique chez les touristes, préserver les environnements naturels et rémunérer correctement les populations locales. 

Pour caricaturer : au lieu de s’entasser par paquet de 600 européens dans un Club Med à Punta Cana où l’on aurait siroté des piña colada à volonté dans une piscine à 28 degrés, l’écotourisme nous propose un charmant séjour dans un petit écolodge (maximum 8 guests) au Costa Rica avec visite d’un parc national et promesse de croiser de la faune sauvage.

Je ne vous apprends rien, les immenses resorts vendant des formules all-inclusive + aquagym le samedi matin ont des effets dévastateurs sur l’environnement. On le sait, le tourisme de masse est une calamité pour la biodiversité [13], une arnaque pour les populations locales [14] et une catastrophe pour les émissions de gaz à effets de serre (GES) qu’il génère [15, 16]. 

Là où cela se complexifie c’est que la 2ème proposition de séjour est loin d’être parfaitement respectueuse de l’environnement. En effet, l’utilisation du terme écotourisme a légèrement évolué depuis sa définition initiale. Il ne garantit pas du tout le respect des 3 principes précédemment cités. 

Critique du concept de l'écotourisme

Tout d’abord, l’écotourisme proposait une refonte du concept en promettant de voyager mieux sans intégrer l’idée qu’il faudrait aussi voyager moins. Ainsi, au lieu de superposer nos 600 européens dans un immeuble à x étages en bord de mer tropicale, il allait falloir les étaler dans x petites structures dont la surface totale prendrait tout autant de place (voire plus). Il faudrait toujours les transporter par avion et les nourrir. Bilan de la révolution touristique : pas de diminution d’émissions de GES, toujours besoin d’autant de ressources alimentaires, toujours autant de déjections produites et à traiter et une augmentation de l’occupation des sols. L’unique point positif potentiel étant que l’on n’aurait pas trop dégradé visuellement le littoral avec une immense construction. 

Au-delà de l’aspect « protection de l’environnement », on peut aussi s’interroger sur l’univers promis à travers la vente de voyage d’aventure. On y retrouve tout un champ lexical s’inspirant largement de l’idée d’être le « premier » à explorer un lieu vierge de toute présence humaine (comprendre “humain blanc”) et qui semble être synonyme de dépassement de soi. C’est assez troublant de se rendre compte que le vocabulaire marketing utilisé dans ce contexte, vient s’appuyer sur des réflexes postcoloniaux qu’il serait grand temps d’enterrer définitivement (ou de questionner, à minima) [6].

Le slow voyage, la solution pour des vacances écologiques ?

Bon, maintenant que l’ambiance est bien plombée, qu’est-ce qu’on fait ? On a vu qu’il était important de remettre en question toutes les facettes qui composent notre vision actuelle du tourisme. C’est ce que propose le slow voyage. En considérant le temps comme la première ressource limitante qui vient nous contraindre dans nos choix de voyage et en choisissant de s’en absoudre, il devient possible de continuer d’explorer le globe sans abîmer sa biodiversité [c’est évidemment en faisant l’hypothèse que l’argent n’est pas la première ressource limitante, ce qui est discutable, je vous l’accorde]. Dans la suite de cet article, je vous propose de décrypter ce qui pollue le plus dans un voyage classique et de chercher des solutions slow voyage pour y remédier.

Qu’est-ce qui pollue beaucoup pendant un voyage ?

Dans cet article nous allons nous intéresser uniquement aux émissions de GES qui constituent une mesure facilement comparable en termes d’impact global. Néanmoins, gardons en tête que nos actions ont aussi des conséquences sur la biodiversité et les populations humaines locales. L’impact sur la vie qui nous entoure est plus difficilement quantifiable mais reste un paramètre essentiel (on vous en parlait ici).

En se concentrant sur les GES, on distingue 3 postes de dépenses énergétiques majeurs lors d’un voyage : le transport, l’hébergement et l’alimentation.

La pollution liée au transport

Peu importe le mode de transport pour lequel vous opterez (sauf si vous vous propulsez à la force de vos mollets, en marchant ou à vélo), le déplacement sera émetteur de GES et donc polluant. L’objectif central est donc de MINIMISER votre impact environnemental, et non pas de l’annuler comme le prétendent tout un tas d’organisme (on vous en parle dans l’article sur l’empreinte carbone et sur le greenwashing).

Le train est votre BFF

Si on reste en France (hors outre-mer et corse) le train l’emporte systématiquement sur l’avion en termes d’émission carbone ([3], [4]). Cela est principalement dû au fait que le mix électrique* français provient à 72% du nucléaire et 12% de l’hydraulique (2 modes d’énergie bas carbone) [5]. Donc pas de débat, si on reste en France hexagonale: le train sera toujours plus intéressant que l’avion et la voiture. Il a le mauvais gout d’être souvent plus cher et plus long mais c’est un moindre mal puisqu’il nous permet de continuer à pouvoir voyager sans émettre trop de GES.

mix-électrique-écotourisme

En revanche, ça se complique lorsque l’on franchit nos frontières. Comme on vous le répète trop souvent, il n’y a pas une solution unique et simple qui s’appliquerait internationalement. On vous conseille donc de vous lancer dans des recherches minutieuses concernant les pays que vous souhaitez visiter afin de prendre les meilleures décisions.

On vous glisse ici une liste (non exhaustive) de pays européens où l’on est sûrs que le train est plus écoresponsable que l’avion (ne nous remerciez pas) : Suède, Finlande, Norvège, Suisse, Slovénie, Slovaquie, Lettonie, Autriche [8].

Et les autres moyens de transport ?

Dans la majorité des cas l’avion semble pire que tout autre moyen de transport. Il est donc préférable de l’éviter au maximum. Mais dans quelle mesure le train est-il vraiment gagnant sur la voiture par exemple ? Doit-on dire adieu aux road trips ? 

Pour simplifier, ce qu’on peut se dire c’est que les moyens de transports collectifs terrestres sont toujours une meilleure solution aux déplacements solo. On émettra moins de GES en voyageant en bus ou en train que dans sa voiture (même si on est 4). Il vaudrait donc mieux oublier les road-trips en van… 

Bon à savoir : Estimer les émissions de CO2 pour chaque moyen de transport n'est pas une mince affaire. Chaque estimation proposée au lecteur est issue d'une ribambelle d'hypothèses et si on en fait tous les mêmes, on ne retombe pas sur les mêmes chiffres.

Et sur l’eau ?

Après avoir exploré les options possibles dans les airs et sur la terre, on va s’intéresser aux transports maritimes. Difficile de trouver des chiffres sourcés mais d’après nos petits calculs, il semblerait que les trajets réalisés en ferry ou en paquebot soient pires encore que l’avion. On vous décrit en détails comment nous obtenons notre estimation en fin d’article.

Sur différents sites on retrouve ce même ordre de grandeur (que nous ne sommes pas arrivés à vérifier mais qui tombe dans la fourchette de notre estimation) : 267gr eq CO2/km/passager pour les ferries contre 209 gr eq CO2/km/passager pour un vol long-courrier [9,10]. Les croisières sur paquebots et autres traversées en ferry sont donc très polluantes. De plus, il n’y a pas que le CO2 qui pose problème ici puisque le carburant utilisé rejette de grandes quantités de particules fines. 

Un nouveau mode de transport maritime est devenu en vogue ces dernières années : les voyages en cargo. Sur ce sujet, les avis divergent. Certains estiment que c’est un transport zéro émission puisque ces porte-containers feront le trajet avec ou sans vous [9]. D’autres, au contraire, pensent qu’il faut effectuer les mêmes types de calculs que pour les autres déplacements. On vous laisse vous faire votre avis sur la question, n’hésitez pas à lire des sources qui sont en désaccord pour affiner votre point de vue.

Les alternatives vraiment respectueuses de l’environnement 

Ce paragraphe ne va pas ravir les fainéants mais un moyen sûr pour ne pas émettre de GES lors de nos déplacements c’est en utilisant nos jambes. Il est alors possible d’imaginer un itinéraire comprenant des portions uniquement tractées par nos foulées ou nos coups de pédales. De nombreux aventuriers ont déjà expérimenté et raconté leurs périples en France (ici par exemple) et à l’étranger (ici ou ici). Le site un-monde-a-velo.com  présente divers témoignages de cyclotouristes ayant sué à travers l’Europe, si vous cherchez de l’inspiration.

Une option pour les moins sportifs (mais ayant le pied marin), c’est le voilier ! Retrouvez un dossier très complet à ce sujet sur le site tourdumondiste.com. On retrouve aussi de nombreuses comparaisons d’émissions de GES pour une traversée de l’Atlantique s’inspirant du voyage réalisé par Greta Thundberg pour assister au sommet sur le climat de l’ONU en 2019 [7].

Émissions de CO2 - écotourisme

Globalement toutes les options de déplacements non motorisés (mobilité douce) sont à envisager : trek, vélo, roller, canoë-kayak, voilier, cheval, roulotte, randonnée avec ânes/mules etc.

La pollution liée à l’hébergement

Une fois la question du transport réglée, on peut se concentrer sur l’hébergement. C’est une étape à ne pas négliger. En effet, il existe de grandes différences entre les différents établissements où vous pouvez passer une nuit, notamment en termes de traitement de eaux, d’occupation des sols, de gestion des déchets, etc.

Privilégier les petits établissements et dormir chez l’habitant

Il est difficile de vérifier les dires des établissements hôteliers en raison du conflit d’intérêt évident qu’ont ces derniers à nous communiquer des chiffres fiables. On peut alors se référer à différents labels tels que l’Ecolabel Européen ou le Green Globe. Retrouvez un guide détaillé de l’ADEME concernant ces labels internationaux et européens [12]. 

Il est possible de se diriger vers des lieux de vie qui offriront aussi une rencontre avec des locaux en dormant chez l’habitant (et en le rémunérant correctement svp). N’hésitez pas à consulter ces réseaux d’hospitalité pour trouver votre bonheur.

Pas d’impact en bivouac ?

Cela paraît être la solution la plus propre. Si, et seulement si, on est capable de laisser l’endroit où l’on a dormi, vierge de toutes traces de notre nuit. Donc on pense à ramasser tous nos déchets derrière nous (et même ceux des autres si on en aperçoit). En ce qui concerne les déchets que l’on considère biodégradable (comme des épluchures de légumes) on les ramène aussi avec nous, surtout s’ils ne poussent pas naturellement sur le site que vous visitez (en effet, il y a un risque que l’espèce s’implante et devienne invasive). On choisit des produits de douche et de vaisselle biodégradables et respectueux de l’environnement et on ne gaspille pas l’eau !

Il ne faut pas oublier, non plus, que notre simple présence représente un dérangement pour la faune et la flore locale. Cela peut être tentant d’installer son campement à distance des espaces dédiés (l’enfer, c’est les autres…) mais il faut considérer que cela représentera un dérangement imprévu. L’avantage de rester dans des zones avec d’autres humains c’est que celles-ci sont connues de la faune qui les utilise à leur avantage (soit en les évitant soit en y allant pour se protéger d’autres espèces).

Alimentation et séjours écoresponsables

Dernier point et non des moindres : MANGER. Ce poste de dépense énergétique est aussi à considérer avec soin.

Encore une fois, privilégier les petits établissements

Vous êtes venus en voyage pour vous ouvrir l’esprit et cela passe par la découverte de nouvelles saveurs. Rien de tel que de visiter des établissements typiques, proposant des plats conçus à partir de produits locaux. On vous le répète ici (et ici aussi), mais si vous souhaitez limiter votre empreinte carbone il faut à tout prix réduire sa consommation de viande (même en vacances). Optez donc pour des plats végétariens !

On pensera aussi à se renseigner sur les « règles » liées aux pourboires relatifs au pays que l’on parcourt. Elles peuvent grandement changer d’un pays à un autre et vous vous devez d’être respectueux des acteurs locaux. Dans certains pays, les serveurs et autres employés de restauration sont rémunérés essentiellement grâce aux pourboires !

À la découverte des marchés locaux

Si vous avez la possibilité de faire vos propres repas, on vous conseille de faire vos courses sur les étals des marchés locaux. C’est l’occasion de découvrir de nouveaux produits, de vivre une expérience au sein de la culture locale mais aussi de choisir des légumes produits localement et de saison. On le sait, limiter le transport de ce qu’on consomme permet de réduire l’empreinte carbone de notre assiette.  

Greenwashing et autres agences de voyages « écologiques »

Au cours de mes recherches sur ce sujet je suis souvent tombée sur des articles provenant directement d’agences de voyages ou de sites qui regroupent des agences de voyages. Pour vous faire une petite métaphore c’est un peu comme les études sur le réchauffement climatique commanditées par Total, autrement dit : très, très biaisé.

Aujourd’hui c’est terriblement tendance d’être écolo, et donc c’est très rentable de prétendre l’être. En jouant sur la corde sensible des consommateurs, il est assez facile de les convaincre de passer à la caisse en leur faisant croire que c’est pour le bien des [insérer n’importe quelle espèce protégée] sans pour autant agir concrètement pour leur protection.

On se doute bien que les conflits d’intérêts sont importants dans ces entreprises. Entre vous vendre effectivement un séjour écoresponsable qui pollue peu, qui a demandé beaucoup de travail de calcul pour estimer son impact environnemental (et qui a de fortes chances de paraître moins sexy) ou ajouter seulement les quelques mots clés à la mode qui déculpabilisent les voyageurs et les voyagistes, le choix est malheureusement vite fait.

Encore une fois, c’est à la charge du consommateur de s’informer et d’apporter un regard critique sur les offres qui lui sont proposées. On aimerait que ce soit différent, mais c’est comme ça. Il est donc important de vérifier si les voyages écologiques présentés le sont véritablement. 

Malheureusement on ne connaît pas de moteur de recherche que vous permettrait de faire aisément le tri. On vous propose donc une petite liste de trucs à vérifier :

Estimation de l’impact environnemental du voyage

Si on vous vend un voyage comme étant éco-responsable et que ne vous donne aucun moyen de le vérifier par vous-même, c’est qu’il y a anguille sous roche. 🚨 Attention, certains apposent des petits logos verts rappelant la nature pour vous faire croire qu’un label a vérifié tout ça. Certains sont vrais et d’autres inventés de toutes pièces. Ils ne seront suffisants que si l’entreprise vous communique sa méthode d’estimation d’impact clairement (en ligne ou par mail). 

Les engagements de l’entreprise

S’ils communiquent explicitement sur le côté écologique des voyages vendus il y a fort à parier qu’ils sont « engagés » à l’échelle de leur entreprise. Le problème ici c’est que les bons comme les mauvais élèves ont tout intérêt à communiquer là-dessus. À vous de décrypter les engagements qui semblent pertinents de ceux qui sont à côté de la plaque. (par exemple, lisez notre article sur le greenwashing pour aiguiser vos talents de détecteur de gros mensonges).

Le tourisme de la dernière chance 

Si on vous propose des destinations vouées à disparaître (en Antarctique ou ailleurs), FUYEZ. L’argument principal étant que ces endroits n’existeront bientôt plus, n’est pas une raison pour participer à l’extinction précipités de ces derniers. On vous conseille ces deux articles à ce sujet (ici et ).

Les 10 commandements du voyageur éco-responsable ou écovoyageur

#1 Inspirez-vous correctement 

Éviter les influenceurs qui enchainent les destinations à 100 à l’heure. Optez pour des humains qui voyagent à une allure raisonnée. Vous trouverez pléthores de blog et autres témoignages qui seront bien plus informatifs que des sites de voyages. Il y a des gens qui se lancent dans ce genre d’aventures folles : comme un tour du monde sans avion par exemple (voir le blog et les vidéos de Iznowgood). 

#2 Anticipez au maximum

Il sera nécessaire de préparer le voyage bien en amont. Adopter une démarche slow voyage n’est pas de tout repos et demande énormément d’anticipation pour ne pas céder à la facilité lorsque vous serez sur place. Au-delà de votre itinéraire, il vous faudra un petit peu de matériel de base pour subvenir à vos besoins essentiels sans venir entacher votre initiative. Voici une liste non exhaustive de choses élémentaires qu’il vous faudrait avoir dans vos valises : gourdes, couverts réutilisables, sacs en tissus … plus d’infos ici.

#3 Développer votre esprit ‘Sans trace’

Particulièrement dans les parcs nationaux, respectez les tracés de circuit, marchez là où les autres ont déjà marché. Les pas des randonneurs ont un impact néfaste sur la flore locale étant trop fréquemment piétinées par des flopées de visiteurs. 

Toujours dans l’optique de passer inaperçus et de ne pas impacter l’environnement que l’on visite, on respecte la faune sauvage en l’observant de loin et le plus discrètement possible. De plus, on ne repart avec rien de prélevé sur place. C’est tentant mais on évite à tout prix. 

#4 Zéro déchet

Lorsque vous partez en exploration ou visite de lieux ou de paysages, anticipez la gestion de vos déchets. Vous venez avec de la nourriture emballée, vous rentrez avec vos emballages pour les jeter dans des poubelles adéquates. Le vent, les oiseaux et autres animaux fouillent les poubelles ce qui provoque l’envol des déchets. On emmène donc toujours un sac poubelle avec nous pour éviter de se retrouver embêté. On peut pousser la démarche plus loin, notamment en bivouac et ramenant le papier hygiénique utilisé.

#5 Silence ça tourne !

On a tendance à l’oublier mais le bruit est une forme de pollution. Donc on s’astreint à être le plus discret possible, acoustiquement aussi. Ce qui permettra par la même occasion de respecter les autres visiteurs qui sont entrain de suivre un itinéraire semblable au votre mais aussi de respecter les animaux qui vous entourent. La pollution acoustique génère du stress chez de nombreuses espèces et nous ne sommes pas là pour les perturber (sauf dans les cas où il est recommandé d’être bruyant. Par exemple dans certains parcs où vous pourriez vous retrouvez nez à nez avec de grands prédateurs).

#6 Manger local

Vous êtes venus jusqu’ici pour découvrir une culture et cela passe par la nourriture. En plus de rencontrer de nouveaux plats méconnus et d’éveiller vos papilles, il y a de fortes chances pour que les ingrédients qui constituent ce repas traditionnel soient produits localement et donc avec un impact réduit sur l’environnement. Si vous avez la possibilité de cuisiner vous-même, aller vous approvisionner sur les marchés locaux, en plus d’une immersion totale vous ramènerez dans votre cuisine des produits de la région.

#7 Prenez des guides locaux et rémunérez les gens au prix juste

Faites travailler des guides locaux et profitez-en pour en apprendre plus sur l’histoire, la géologie, la biologie des lieux que vous traversez. Choisissez des établissements (hébergements, restaurations, locations de véhicules, excursions, etc) tenus par des habitants de la région que vous visitez, c’est important de rémunérer ces personnes et non des expatriés venus profiter d’un business.

#8 Prenez votre temps

C’est LA ressource limitante et il faut accepter que tout soit plus long et moins immédiat mais c’est ce qui fait la beauté de ce chemin. 

#9 I protect Nature

Ne divulguez pas les coordonnées d’où vous ne pourrez pas vous empêcher de prendre des photos sublimes et de les poster sur les réseaux. Une initiative sur les réseaux sociaux a émergé, consistant à ne pas localiser les photos que vous postez mais de remplacer la localisation par « I protect Nature ». Ceci préservera l’intégrité du site en évitant d’augmenter sa fréquentation.

Si jamais vous avez la chance de croiser un individu appartement à une espèce menacée, il est recommandé de ne pas poster de photos DU TOUT. Même en désactivant la localisation de vos appareils (qui peuvent être extraites de vos photos pour retrouver l’animal), le décor entourant l’individu peut servir d’indication à des braconniers.

#10 Personne n’est parfait

Il y aura des imprévus que vous aurez (quelque part) envisagé et certains qui seront des totales surprises. C’est ce qui fait le sel de ce genre d’aventure. Dans ces situations il faut savoir relativiser et se dire que ça ne remet pas en question l’intégralité de notre démarche. Il y aura aussi probablement des bonnes surprises qui viendront faciliter vos déplacements et peut-être compenser les bêtises que vous n’aviez pas vu venir. 

Vous avez désormais toutes les cartes en main pour envisager d’une nouvelle manière vos prochaines vacances !

Sources :

[1] Définition Le Robert

[2] Wikipédia – ecotourisme 

[3] https://bonpote.com/le-match-co2-train-vs-avion/

[4] https://bonpote.com/train-vs-avion-match-retour/

[5] https://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/mix-energetique-de-la-france

[6] Boukhris, L., & Peyvel, E. (2019). Le tourisme à l’épreuve des paradigmes post et décoloniaux. Via. Tourism Review, (16).

[7] https://fr.sailsquare.com/blog/conseils/sailsquare/enquete-les-voyages-en-voilier-sont-ils-vraiment-eco-responsables/

[8] https://fr.wikipedia.org/wiki/Électricité_en_Europe

[9] https://www.tourdumondiste.com/limiter-son-empreinte-ecologique-en-voyage

[10] https://www.greenly.earth/blog/empreinte-carbone-comparatif-transports

[11] GLEC – The global method for calculation and reporting of logistics emissions – Février 2020

[12] https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/labels-environnementaux#labelsrow-3

[13] Kuvan, Y. (2010). Mass tourism development and deforestation in Turkey. Anatolia21(1), 155-168.

[14] Chong, K. L. (2020). The side effects of mass tourism: the voices of Bali islanders. Asia Pacific Journal of Tourism Research25(2), 157-169.

[15] Terrenoire, E., Hauglustaine, D. A., Gasser, T., & Penanhoat, O. (2019). The contribution of carbon dioxide emissions from the aviation sector to future climate change. Environmental research letters14(8), 084019.

[16] Cavallaro, F., Galati, O. I., & Nocera, S. (2017). Policy strategies for the mitigation of GHG emissions caused by the mass-tourism mobility in coastal areas. Transportation Research Procedia27, 317-324.

------------------ Détails calcul émission de CO2 pour un voyage en ferry ------------------

Toutes les sources sur ce sujet pointent vers un rapport (en anglais) [11]. Lorsqu’on consulte ce document on trouve la figure 17 qui présente des estimations d’émissions de GES pour les transports maritimes. Les ferrys servant à transporter des personnes sont de type Ro-Ro et émettent entre {20 ; 120} g CO2 e/tkm. Cette unité est décrite plus haut (dans le document [11]) et donne la quantité de CO2 émise lors du transport d’une tonne de cargo (ou ferry ou paquebot) sur 1 km. Si on prend un ferry de Corsica ferries qui pèse 3 500 tonnes et peut transporter 1756 passagers (d’après wikipedia), qui en moyenne voyage avec un taux de remplissage de 40% (Base carbone de l’ADEME), on tombe sur une fourchette de [99 ; 598] g CO2/km/passager.

Temps de travail cumulé : 30h
Autrice : Salomé Bourg

Ces dernières années, on entend très souvent les termes “empreinte carbone” ou “bilan carbone”. Ces mots sont partout. iIls reviennent à toutes les sauces et dans tous les contextes.

Dans cet article nous commencerons par définir des termes importants pour la compréhension globale de cette thématique comme « GES », « effet de serre » ou « tonne équivalent carbone »

Ensuite nous entrerons dans le vif du sujet en décortiquant les concepts d’empreinte carbone, empreinte écologique et bilan carbone.

Empreinte carbone, bilan carbone et empreinte écologique… Comment s’y retrouver ?

Quelques définitions importantes

Ce sujet est un peu compliqué et utilise des termes particuliers. Restez avec nous pour un déchiffrage de tout ce jargon ! Si vous êtes familiers de ces questions, on se retrouve un peu plus bas.

Les gaz à effet de serre

Les gaz à effet de serre (ou GES) sont des gaz présents dans l’atmosphère. Ils sont responsables de l’effet de serre. Par sa composition, l’atmosphère “retient”, en effet, plus ou moins de “chaleur” sur la surface de la planète et permet donc de “réguler” la température.

Une partie de l’énergie reçue par le soleil est directement réfléchie par l’atmosphère et les surfaces claires de la planète (par exemple, les banquises) et renvoyée dans l’espace : c’est l’albédo. Grâce à cela, il ne fait pas trop chaud et les UV sont filtrés. Le reste est absorbé par la surface de la planète. S’ensuivent ensuite des échanges de rayons infrarouges entre surface et atmosphère. C’est grâce à cela qu’il ne fait pas trop froid non plus. Ces effets combinés de l'atmosphère permettent la vie sur Terre. Les GES, selon leurs concentrations, vont impacter la quantité d’infrarouges (et donc de chaleur) qui est renvoyée sur la surface de la planète, impactant ainsi la température.

Les principaux GES naturels sont (par ordre d’importance) :

Les gaz à effet de serre sont donc présents naturellement dans l’atmosphère et sont essentiels à la survie des espèces.

C’est quoi le problème alors ? Le problème c’est que depuis la révolution industrielle, les activités humaines ont fait augmenter de manière exponentielle la concentration des GES dans l’atmosphère augmentant ainsi l’effet de serre et causant le réchauffement climatique [1]. On parle d’effet de serre « anthropique », qui s’ajoute à l’effet de serre naturel.

Bon à savoir - GES

Grâce à l'absorption par des "puits" des GES émis naturellement, les concentrations GES dan l'atmosphère étaient régulés avant que les humains ne mettent le bazar. Les océans, la photosynthèse, l'activité des micro-organismes sont des puits de carbone.

Quelles sont ces activités humaines qui font augmenter la concentration des GES ?

Il est important de le savoir afin de pouvoir agir dessus ! Le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) a répondu à cette question pour nous. Leur analyse des émissions de GES par secteur économique nous révèle que l’un des principaux chevaux de bataille est l’énergie, et en particulier, les énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz naturel).

La combustion des énergies fossiles est par exemple responsable d’une très grande partie de nos émissions de CO2. Leur extraction, transport et utilisation est aussi la seconde source principale de méthane. Les énergies fossiles servent à tout un tas de choses, comme à la production d’électricité, de carburant ou encore au chauffage des bâtiments (chauffage au gaz). Ces ressources sont utilisées dans TOUS les autres secteurs (industries, transport, agriculture, services, logements...) qui relâchent eux même du CO2

Ne pas confondre énergie et électricité

L'électricité n'est pas une énergie mais est produite à partir d'énergies. En France, elle est majoritairement produite à partir du nucléaire (~70%). Mais elle peut être produite à partir d'énergies renouvelables (solaire, hydraulique, éolienne) ou à partir d'énergies fossiles (cad énergies dont le stock est épuisable par exemple le pétrole).

Un second secteur sur lequel il faut agir de toute urgence : l’agriculture.

C’est la source principale de méthane et de N2O. Ces émissions sont dues à l’élevage des animaux destinés au secteur alimentaire (viande mais aussi lait et produits dérivés tels que le fromage, les yaourts etc.), à la culture du riz qui nécessite l’inondation des terres, ainsi qu’à l’utilisation d’engrais azotés. Il faut ici préciser qu’en plus, les activités humaines impactent les puits naturels de GES (via la déforestation par exemple), réduisant ainsi la quantité de GES atmosphériques réabsorbée. Le serpent qui se mord la queue en somme. 

Ces deux secteurs sont responsables à eux seuls de 50% de nos émissions de GES. Et la France ne fait pas exception à ce schéma. Viennent ensuite l’industrie et le transport.

L’industrie est à l’origine d’émissions de GES dits « industriels », c’est-à-dire qui n’ont pas de sources naturelles, comme les halocarbures. Ces gaz sont émis lors de processus industriels comme la combustion de carburants fossiles, le traitement des eaux usées et beaucoup en raison des fuites présentes dans les systèmes de refroidissement. Ils sont en effet utilisés dans tous les systèmes produisant du froid. De notre frigo/congélateur, à la climatisation de nos voitures et bâtiments, en passant par le refroidissement nécessaire aux data center dont nous vous parlions dans notre article sur la pollution numérique. Bien que le protocole de Montréal et l'amendement de Kigali prévoient une disparition future des CFC (responsables du "trou" de la couche d'ozone) et HFC (fort pouvoir de réchauffement global, on vous explique ci-dessous), ils sont encore largement émis et ont impact considérable sur le changement climatique.

Tonne équivalent CO2, kézako ?

Avant de vous parler de l’empreinte carbone, nous devons vous parler de l’unité principalement utilisée pour la quantifier : la tonne équivalent carbone.

En fait, “l’empreinte carbone” ne concerne pas que le carbone (et donc le CO2). Mais bien tous les GES émis par diverses sources au sein d’un territoire. Mais pourquoi parle-t-on d’empreinte carbone si elle ne concerne pas que le carbone ? 

Les scientifiques ont choisi de se concentrer sur le CO2 car c’est le gaz le plus émis. On convertit donc les émissions de tous les autres GES en « équivalent CO2 ». C’est-à-dire, en la quantité de CO2 qui aurait le même impact climatique que la quantité de GES x ou y réellement émise. Dans cette conversion on prend en compte le pouvoir de réchauffement global (PRG) des différents gaz, qui dépend de leur durée de persistance dans l’atmosphère et de la quantité d’énergie qu’ils absorbent (et donc renvoient sur Terre sous forme de chaleur).

En effet, tous les GES ne réchauffent pas autant les uns que les autres. On estime par exemple que sur une période de 100 ans, l’émission d’une tonne de méthane aura des effets sur le changement climatique équivalents à ceux qu’aurait l’émission d’environ 25 tonnes de CO2 (1 tonne de méthane = 25 tonnes équivalent CO2, et 1 tonne de N2O = 300 tonnes équivalent CO2 !).

L’utilisation de la tonne équivalent CO2 permet donc d’avoir une unité unique et commune et de comparer les effets des différents GES.

Empreinte carbone : définition détaillée et comparaison entre pays

L’empreinte carbone c’est la quantité de GES émise par les activités humaines, exprimée en équivalent carbone (ou « eqCO2 », « CO2e », « CO2-eq »). Elle peut être calculée pour un individu, une entreprise, à l’échelle d’un pays, pour un objet ou un service. Sa valeur finale va dépendre de ce que l’on considère dans le calcul.

Si l’on prend l’exemple d’un pays et la définition de l’INSEE, il faudra tenir compte :

Au niveau individuel, elle dépend du pays de l’habitant et des choix de ce pays en termes de production d’énergie mais aussi du mode de vie global de l’individu (on vous en dit plus ci-dessous).

Lorsque l’on raisonne à l’échelle d’un objet, on va pouvoir tenir compte :

En bref, tout son cycle de vie.

On retrouve l’empreinte carbone sur les “étiquettes GES” (ou “étiquettes climat”) des logements. Ces étiquettes permettent d'attribuer une note de A à G à nos habitations. Elles constituent un indice d’émission de gaz à effet de serre. Elles sont accompagnées des étiquettes “classes énergétiques” qui nous renseignent sur la consommation en énergie du logement (ou de tout autre appareil électroménager ou véhicule vendu dans le commerce). 

L’empreinte carbone de la France (et des autres) …

Tous les pays ne sont pas autant émetteurs de GES les uns que les autres. Nous allons nous intéresser à l’empreinte carbone de la France en comparaison avec 9 autres pays/régions du monde parmi les plus émettrices de GES.

Sur le graphe ci-dessous on remarque que la Chine est en tête, suivie par les US. Les autres émetteurs principaux tels que l’Inde, la Russie ou l’Indonésie viennent ensuite. La France ne semble pas faire partie des plus gros émetteurs. (le graphique a été créé grâce au site ClimateWatch, sur lequel vous pouvez aussi aller vous amuser à regarder les pays qui vous intéressent).

Mais il faut, ici, faire marcher son esprit critique. Ces chiffres veulent-ils dire que la France s’en sort bien ? En réalité, ce n’est pas si simple. Décortiquons tout cela ensemble.

La Chine produit énormément de biens (produits informatiques et téléphonie, vêtements et autres objets “made in China”) qu’elle exporte. Ainsi, la consommation du reste du monde a un effet sur les émissions de GES en Chine ! Nous y compris, même si de prime abord “on ne s’en sort pas si mal”.  

C’est pour cette raison que l’empreinte carbone d’un pays doit tenir compte des importations. Sans cela, les pays comme la France, en délocalisant une grosse partie de leurs industries apparaîtraient faussement “verts”. Il en va de même pour l’électricité, la nourriture et tout un tas d’autres choses que l’on importe. De plus, tous les pays n’ont pas le même nombre d’habitants et ne font pas la même taille ! Il est logique qu’un pays dont la population représente 21 fois celle de la France, comme c’est le cas de la Chine, émette plus de GES.

Empreinte écologique : exemple et définition

L’empreinte écologique (ou empreinte environnementale) est un indicateur de l’effet des activités humaines sur la nature. Contrairement à l’empreinte carbone, elle n’est pas focalisée sur les GES. Elle considère l’impact environnemental plus global en comparant d’une part “la demande” (les activités humaines) et d’autre part “l’offre” (la capacité de la Terre à produire des ressources, à absorber des déchets et à se régénérer : la biocapacité).

L’empreinte écologique tient compte de :

Si on la représente par secteurs d’activités, on voit que, comme pour l’empreinte carbone, l’alimentation, les logements et les transports ont le plus d’impacts.

L’empreinte écologique est exprimée en hectares (et non en équivalent CO2) puisqu’elle mesure la superficie biologiquement productive nécessaire pour soutenir la consommation humaine.

Ainsi, pour subvenir aux besoins de l’humanité, la WWF (ONG “World Wide Fund for Nature”) estime qu’il faudrait la superficie de 1.6 Terres. C’est de là que vient le « jour du dépassement » de l’ONG Global Foodprint Network, qui nous donne le jour de l’année à partir duquel on a consommé toutes les ressources que la Terre pouvait produire en 1 an et que l’on vit donc en puisant dans les réserves (à crédit).

Comme le révèle la WWF dans son rapport “Planète vivante 2020”, l’empreinte écologique ne fait qu’augmenter au fil des années, tout comme l’empreinte carbone. Et comme pour cette dernière, vous pouvez calculer votre empreinte écologique personnelle.

📣 Bon à savoir

Attention, il faut ici aussi se rappeler que tous les pays et tous les individus n'ont pas la même empreinte écologique. L'empreinte écologique d'un américain moyen serait de 8 ha alors que celle d'un congolais moyen est estimée à 0.8 ha. Données provenant de [4]

Qu’est-ce que le bilan carbone ?

Le bilan carbone est une méthodologie de calcul développée par l’ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie) en 2004 pour mesurer l’empreinte carbone d’une entité, par exemple, d’un individu (on parle alors de “bilan carbone personnel”) ou d’une entreprise.

Mais, bilan carbone et empreinte carbone sont-ils synonymes ? Oui et non.

En effet, c’est un outil destiné aux entreprises et organisations qui souhaitent mesurer leur empreinte carbone. Il tient compte du secteur d’activité de l’entreprise et de nombreux éléments pour rendre son bilan. Il est aujourd’hui très connu car il est devenu obligatoire pour de nombreuses entreprises.

Pour aller plus loin

Si ces sujets et cet article vous ont intéressés, vous trouverez ici des pistes à creuser pour en apprendre plus sur le changement climatique et les impacts anthropiques. Par exemple, si l’on a beaucoup parlé ici des gaz à effet de serre, ce ne sont pas les seuls acteurs dans toute cette histoire. Les aérosols jouent aussi un rôle.

De la même manière, vous pouvez creuser les questions liées aux problèmes posés par la compensation carbone, en consultant entre autres cet article (et plus généralement le site) de « Bon Pote ». Ou en écoutant ce podcast.

Le podcast « Y’a le feu au lac » vous parle aussi des enjeux liés à la voiture électrique.


Temps de travail cumulé : 35h
Autrices : Élodie Portanier et Salomé Bourg

Autres sources et références

[1] IPCC Fifth Assessment Report, 2014

[2] https://www.liberation.fr/apps/2018/09/empreinte-carbone/

[3] https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/poids_carbone-biens-equipement-201809-rapport.pdf

[4] https://data.footprintnetwork.org/#/

Des entreprises qui, du jour au lendemain, se déclarent super engagées pour le climat et l’environnement. Des produits qui sont subitement commercialisés dans un nouveau packaging vert et sur lequel sont apposés les mots « durable » et « naturel ». Étrange non ?

Soyez les bienvenus dans l’univers du greenwashing !

Ces dernières années, une conscience écologique marquée s’éveille dans nos sociétés. Cet engagement citoyen en faveur du développement durable se traduit par une révision de nos habitudes quotidiennes et l’adoption de pratiques plus responsables. Et nos modes de consommation ne sont pas laissés de côté !

Mais alors que « l’argument écologique » a été créé pour nous accompagner dans cette démarche écoresponsable, en permettant de mettre en valeur l’engagement environnemental des entreprises, « l’auto-déclaration écologique » a, elle aussi, vu le jour !

Communiquer sur des actions symboliques qui ne sont absolument pas représentatives du fonctionnement réel de l’entreprise. Se donner bonne conscience en mettant en avant les solutions apportées à des problèmes insignifiants à l’échelle de sa société, etc. Les options sont nombreuses pour s’autoproclamer entreprise « écologiquement responsable » !

Toutes ces techniques de communication et de désinformation peuvent être qualifiées de greenwashing. On parle d’écoblanchiment en français (ou aussi blanchiment écologique ou verdissage).

Le greenwashing est dangereux. Dans le sens où il est mis en œuvre pour nous pousser à consommer. Il peut tout simplement nous stopper dans notre démarche écoresponsable. Il est donc important de mieux comprendre cette technique de communication malhonnête, et de savoir la repérer !

Pour ce faire, nous vous proposons dans cet article :

Définition simple du Greenwashing, ou « Écoblanchiment »

Le greenwashing, ou écoblanchiment, est une stratégie de communication et de marketing qui consiste à donner une image responsable et durable, écologique donc, à une organisation, à marque ou à un produit, alors qu’il n’en est rien.

Ce procédé vise à « manipuler » l’opinion du consommateur en mettant en avant des arguments écologiques à des fins purement économiques. En d’autres mots, le greenwashing consiste à arborer une image écologique trompeuse pour vendre plus !

L’environnement et le développement durable sont devenus des thèmes porteurs et vendeurs. Nous nous soucions en effet de plus en plus de nos pratiques de consommation, mais aussi des valeurs et de l’engagement environnemental des entreprises pour lesquelles nous travaillons par exemple.

L’argument écologique, en s’intégrant dans nos considérations quotidiennes, s’est transformé en une source de profit. 

Les stratégies de communication et de marketing des entreprises se sont donc adaptées pour répondre à cet engagement écocitoyen ! En effet, quel meilleur moyen pour attirer les consommateurs avec une sensibilité écologique grandissante que de se forger une image écoresponsable ? Au début des années 1990, des ONG prônant les bonnes pratiques environnementales et soucieuses à la fois de l’environnement mais aussi des consommateurs, ont créé le terme de greenwashing pour dénoncer certains grands groupes industriels qui avaient recours à ce procédé.

Les termes de greenwashing, écoblanchiment, ou bien encore green marketing, se sont fortement popularisés au cours des années 2000. Malgré l’objectif initial de dénonciation et donc d’information du consommateur, le greenwashing génère aujourd’hui une confusion forte auprès des consommateurs. Cette confusion peut parfois nuire aux entreprises réellement engagées dans des démarches de développement durable.

Il est donc important de savoir reconnaitre les pratiques de greenwashing afin de les éviter, et ainsi de valoriser les produits et services réellement écoresponsables.

Quelles sont les techniques de greenwashing utilisées par les entreprises ?

Revenons sur ces techniques de greenwashing plus en détails :

Ne communiquer que sur des problèmes résolus

L'objectif ici est de détourner l’attention du public. En se concentrant sur les solutions écoresponsables apportées à des problèmes non représentatifs du fonctionnement global de l’entreprise, on passe sous silence les problèmes majeurs NON résolus. Par exemple : mettre en avant l’installation de poubelles de tri dans les bureaux de son entreprise alors que les usines produisent toujours des tonnes de déchets non recyclables chaque année.

Communiquer sur des solutions hypothétiques

Deuxième option : spéculer sur des progrès techniques à venir. Toujours avec pour objectif de détourner l’attention du public en faisant passer les problèmes existants au second plan. Par exemple : mettre en avant la construction à venir d’un nouveau terminal dédié aux avions à hydrogène. Alors que ces avions n’existent pas à l’heure actuelle.

Communiquer sur des actions symboliques

On continue en jouant sur les émotions : toucher la sensibilité environnementale des clients/consommateurs. Ici la communication se fera sur des actions insignifiantes à l’échelle de l’entreprise. Par exemple : instauration d’une journée « Je me rends au travail à vélo ». Alors que l’entreprise est spécialisée dans le vente de semences OGM dans tous les pays d’Afrique.

Communiquer sur des chiffres sans rapport avec l’activité de l’entreprise

Faire parler les chiffres qui inspirent confiance et légitiment l’action en place, bien que cette dernière soit complètement déconnectée de l’activité de l’entreprise. Par exemple : compensation des émissions de gaz à effet de serre alors que 10 000 avions décollent quotidiennement grâce à cette entreprise.

Techniques de greenwashing des entreprises

Et ce n’est pas tout ! Les entreprises mettent également de nombreux outils de communication au service de ces procédés de greenwashing. Une démarche parfaitement imaginée pour attirer les consommateurs, investisseurs, etc. grâce à l’argument écologique qui est mis en avant de toutes les manières possibles, directes ou non !

Quels sont les outils de communication mis au service de l’écoblanchiment ?

Une touche de vert, un peu de blanc, une photographie de paysage, un label sorti de nulle part, un ou deux mots appartenant au champ lexical de la nature, voici les bases d’un greenwashing en bonne et due forme !

Petit point sur les outils de communication utilisés pour pratiquer le greenwashing :

Outils de communication de greenwhasing et écoblanchiment

Les stratagèmes et techniques ne manquent pas pour nous convaincre du bien-fondé d’un produit/service. Mais alors comment savoir vers quel produit/service nous tourner ? Comment reconnaitre un produit/service ayant recours à la stratégie du greenwashing, d’un produit/service écoresponsable en qui nous pouvons avoir confiance ?

S’entrainer à reconnaître le greenwashing (ou écoblanchiment) pour l’éviter : 2 exemples concrets

Nous avons maintenant une idée assez claire des techniques et outils utilisés par les entreprises pour pratiquer ce procédé de greenwashing. Il est donc temps de s’entrainer à le reconnaître, pour ne plus se faire avoir ! Pour ce faire, deux exemples concrets à décortiquer : un faux tee-shirt écoresponsable produit par une entreprise de fast fashion, et des voyages d’aventure soi-disant « durables ». Nous allons donc reprendre ces exemples ensemble, et établir la liste de tout ce qui « cloche » et nous prouve qu’il s’agit bel et bien d’un procédé de greenwashing et non d’une démarche écoresponsable.

Exemple de Greenwashing #1 : Un faux tee-shirt écoresponsable

Exemple de greenwashing et green marketing

Pour rappel, le principe de la fast fasion c’est de produire de très grandes quantités à bas coût, tout en générant de petites marges. Cette stratégie implique de devoir produire en très grandes quantités, à un prix très bas et à fréquence élevée. En d’autres mots, vendre à bas prix des vêtements de mauvaise qualité qu’il faudra renouveler très souvent ! 

Reprenons maintenant un à un les éléments qui nous prouvent que nous sommes face à un cas de greenwashing :

Onglet développement durable

Premier indice (bien que flagrant !) qui nous indique que ce produit n’est pas représentatif de l’activité globale de l’entreprise, et qu’il s’agit de ce fait plus d’une action de communication calculée que d’un réel engagement environnemental.

Ambiance nature

Second indice avec ces rappels incessants à la nature et à l’environnement qui s’adressent directement à notre sensibilité écologique. Couleurs verte et blanche que l’on retrouve à la fois dans le design de la page et dans le produit. Mais aussi présence de feuilles qui viennent accentuer ce rappel à la nature. Ou encore étiquette en papier kraft qui véhicule un message de matériaux recyclés. On use et abuse des outils de communication ici !

Utilisation abusive de "responsable" et "durable"

on vient ancrer un peu plus cet argument écologique dans l’esprit du consommateur en utilisant autant que possible le vocabulaire qui acte cet engagement environnemental. Mais a-t-on vraiment besoin de le rappeler à de si nombreuses reprises sur une seule et même page si la démarche est réelle et cohérente ?!

Le petit drapeau français sur la manche

qui vient nous faire croire que nous sommes face à un produit Made In France. Alors qu’il est indiqué sur l’étiquette « Designé en France » ! ;

L'étiquette

En un coup d’œil sur la page du produit, vous avez déjà pu repérer tous les signaux d’alerte. Manque de transparence, incohérence forte dans la démarche globale, et trop nombreuses preuves forcées d’écoresponsabilité. Vous avez tous les signaux pour faire demi-tour et ne pas consommer ce produit ! En résumé, à part son message « There is no planet B », ce tee-shirt n’a rien de responsable ou de durable !

Exemple de Greenwashing #2 : Des voyages d’aventure faussement durables

Exemple d'éco blanchiment

Intéressons-nous maintenant à cet exemple de greenwashing qui nous a été servi sur un plateau d’argent par une agence de tourisme. Vous allez voir qu’il nous est possible de détecter les incohérences de la démarche en un coup d’œil :

Titre de la page : Tourisme durable

Pas de détour ici, on se fait bombarder par l’argument écologique aussitôt arrivé sur le site web. Vous me direz, jusqu’ici pas de problème. Si la démarche est réelle, il s’agit d’un engagement fort et il est légitime de le mettre en avant.

Des voyages 100% carbone neutre

Difficile à ce stade de lecture de la page de savoir exactement ce que cela signifie.

La liste d'engagements

Sauver la biodiversité, lutter contre le réchauffement climatique, et réduire la pauvreté. En d’autres mots sauver le monde (à quelque chose près) et tout ça … en faisant voyager les gens aux 4 coins du globe ! Vous comprenez comment c’est possible vous ? Parce que moi non !

Les destinations du moment

Mexique, Costa Rica, Mauritanie et Finlande, aucune destination « locale » puisqu’il s’agit d’une agence de voyage française. On retrouve uniquement des propositions de vols long-courrier (à l’exception de la Finlande). Ces vols sont émetteurs d’une quantité astronomique de gaz à effet de serre. Complètement incompatibles avec des voyages 100% carbone neutre donc !

Mais non! Puisque l’entreprise s’engage à « absorber l’ensemble des émissions de CO2 générées par le transport aérien des voyageurs ». Ce qui sous-entend implicitement que :

Pas besoin d’aller plus loin dans notre visite du site web de cette agence pour se rendre compte qu’il s’agit d’un bel exemple de greenwashing 

Utiliser la conscience écologique du consommateur pour vendre des voyages qui n’ont rien d’écoresponsable.

Petite précision : les 2 exemples que nous vous avons montré ici ne sont pas « réels ». Il ne s’agit pas d’un copier-coller à proprement parlé. En revanche, ils ne sont absolument pas fictifs ! Toutes ces informations ont été trouvées sur les sites webs d’une grande entreprise de fast fashion et d’une agence de voyage d’aventure, respectivement. Nous avons simplement remanier leurs contenus pour illustrer notre propos, sans pour autant dévoiler leur identité.


Les démarches de greenwashing se multiplient. Les entreprises ne manquent pas d’imagination pour alpaguer les consommateurs en surfant sur la vague de l’engagement écologique.  Il peut donc être difficile de savoir vers quel produit, vers quelle marque, vers quel employeur se tourner.

Alors n’oubliez pas que la transparence et la cohérence sont les clés ! Si la démarche d’engagement est effective, il ne sera pas nécessaire de détourner l’attention du public ou de passer certains éléments sous silence. Il ne vous reste plus qu’à activer vos talents de détective pour déjouer toutes les tentatives de greenwashing.

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